Par Jacques Ferber.
Aucun traité sur la sexualité masculine ne peut éviter les deux fléaux que pratiquement tous les hommes vivent à un degré ou à un autre : les pannes d’érection, que l’on appelle souvent «impuissance» et l’éjaculation précoce. Être traité d’impuissant ou d’éjaculateur précoce est certainement l’une des injures les pires qu’un homme puisse recevoir, bien pire qu’être traité de «con» ou de toute autre appellation du même genre. Cela signifie que ce qui traite à notre puissance sexuelle nous touche beaucoup plus que ce qui est lié à nos caractéristiques cognitives… Il y a certainement là nature à réflexion : celui qui se prétend être un animal doué de raison est finalement plus touché par la remise en question de ses capacités animales que parce qu’il estime le différencier de l’animal !
J’ai tendance à dire qu’il y a trois types d’hommes «sains» :
1) les inconscients ou simples d’esprit (le royaume des cieux est à eux),
2) ceux qui souffrent de pannes d’érection
et 3) ceux qui souffrent d’éjaculation précoce… 😉
Cela ne laisse pas beaucoup de choix.. Effectivement, il y a aussi ceux qui ont un intérêt sexuel focalisé, et qui ne peuvent avoir du plaisir que d’une manière très particulière : fétichisme, sadisme, masochisme, zoophilie, pedophilie, etc… mais là c’est plus de l’ordre de la thérapie… Je ne m’attarderai pas sur la question… (attention, le côté pathologique ne concerne pas les jeux fétichistes et sado-masos « ordinaires » qui ne font que renforcer les liens dans un couple et mettre un peu de piment dans la vie. Il n’y a pathologie que lorsque le plaisir est lié à une pratique qui ne permet pas rencontrer l’autre. Pas quand on joue avec l’autre !!)
En gros, si on n’est pas un gros bourrin, on vit un jour ou l’autre l’une de ces affections. Cela ne signifie pas pour autant que l’on soit un «impuissant» ou un «éjaculateur précoce», mais simplement que l’on a vécu des moments difficiles sur l’un ou l’autre point (et parfois aussi les deux.. arghh…).
Lorsqu’on étudie un peu la question du point de vue physiologique, on constate que l’érection et la capacité de durer dans un coït sont liés à la capacité au système sympathique d’être inhibé et au système parasympathique d’être activé. Or le système sympathique est celui de la vigilance et du stress. C’est le système qui déclenche tout un ensemble d’hormones, dont la noradrénaline, et qui nous prépare à l’action. Sur le plan sexuel, il a deux activités : il inhibe l’érection, il concentre le sang dans les régions centrales du corps et il stimule l’éjaculation. En gros, lorsque le système sympathique est activé, il empêche de bander, ou bien si l’on a réussi à avoir une érection il nous fait éjaculer. Inversement, le système parasympathique est le système qui calme le corps, diminue la fréquence cardiaque, encourage la diffusion du sang à la périphérie du corps. C’est le système que l’on stimule dans la relaxation et qui donne cette impression de chaleur dans tout le corps. Il stimule aussi le désir sexuel et favorise l’érection tout en diminuant la stimulation de l’éjaculation.
On le voit, la panne d’érection et l’éjaculation précoce sont donc dues à une sur-stimulation du système sympathique par rapport au système parasympathique. Plus le premier est activé, plus on souffre de ces affections viriles. En revanche, plus on est détendu, c’est-à-dire plus le système parasympathique est activé, plus on peut bander et moins on éjacule. Or le système sympathique, qui nous prépare à l’action est stimulé par les peurs, les anxiétés, les mises à l’épreuve, par tout ce que l’on considère comme étant quelque chose de difficile à faire. Inversement le système parasympathique est activé par la détente, les pensées agréables, les massages, etc…
Cela signifie une chose et une seule : les problèmes de virilité sont dues pratiquement uniquement à des problèmes d’anxiété et de stress. Ce qui est paradoxal, c’est que cette anxiété et ce stress sont justement liés au rapport sexuel, au fait qu’il est anticiper comme une épreuve… Même si l’on est dans une situation de désir, même si l’on est avec une femme qu’a priori on désir (par exemple on s’est imaginé avec elle et cela nous a fait bander comme un cerf), on peut se trouver dans une situation paradoxale ou notre tête a de l’envie, mais pas notre corps.. Dans ces cas là, c’est assez caractéristique, on ne sent plus réellement de désir : on vit la sexualité comme quelque chose que l’on doit faire… Cela peut arriver notamment la première fois avec une nouvelle partenaire. Cette femme on la désire, mais au moment fatidique, psshuiiit, il n’y a rien qui se passe… On ne sent plus ce frémissement qui excite et anime notre être : la peau de cette femme devient presque du carton, les caresses n’éveillent aucun désir. Pendant ce temps le mental trotte allégrement dans la tête en se disant « il faut que je bande, il faut que je bande !»… On cherche à stimuler cette érection par la pensée, parfois en pensant à une autre femme en espérant que cela déclenche un peu de désir. Mais cela n’a qu’un effet, celui de nous éloigner encore un peu plus de cette femme, et donc de diminuer notre désir et notre érection. On cherche tous les trucs possibles qui nous permettrait de revenir à nous, de diminuer cette anxiété qui se trouve de plus en plus accrue par le fait que l’on ne bande pas tout en se disant « il faut assurer ! ». On entre dans un cercle vicieux : plus on a peur de ne pas bander, plus le système sympathique se déclenche et moins on bande, et donc plus on a peur, etc.. C’est la merde !!
Là je parle surtout de ceux qui souffrent de pannes d’érection. Pour l’éjaculation précoce, cela se passe un peu après. On a toujours peur de ne pas assurer, donc on se presse, on va à toute vitesse, on brûle les étapes. On essaye de pénétrer notre partenaire rapidement pour profiter de notre belle érection, mais là notre stress active le stimulus de l’éjaculation et psshuiiit, ça part tout seul. Ici encore la peur est à la base de cette éjaculation rapide. Évidemment, cette éjaculation trop rapide va nous rendre encore mal : on va se sentir minable, pas à la hauteur, on a peur du jugement de notre partenaire, et notre estime de soi en prend un coup. Ce qui ne facilitera pas le prochain rapport, puisqu’il sera encore plus vécu comme un enjeu.
Inversement, il existe un cercle vertueux qui est celui de la détente, de la confiance en soi et qui passe avant tout par la relaxation, le fait d’être à l’aise et surtout le fait DE NE PAS SE METTRE D’ENJEU !! Bon, je sais que c’est plus facile à dire qu’à faire… Mais essayons d’expliquer un peu ce qui se passe.
D’abord, je ne sais pas si vous avez remarqué dans le récit que j’en ai fait, mais aussi bien dans l’éjaculation précoce que dans la panne d’érection, la femme n’existe pas. Elle est juste le support de nos phantasmes d’assurer (« il faut que j’assure pour plaire à cette femme et lui prouver que je suis un vrai mec »), mais quelque part elle n’est pas là pour nous… On est totalement dans notre mental à penser à tous nos problèmes mais pas en relation avec cette femme, avec son regard, son souffle, ses désirs, son corps qui réagit à nos caresses… Ce n’est plus réellement un partage ou une rencontre faite de découverte et de sensualité, mais juste un film intérieur que l’on vit tout seul…
Or c’est cette coupure qui est la cause de nos maux, le fait qu’on parte en roue libre dans nos pensées négatives et qu’on ne sente plus de désir, ou une surstimulation. En gros on s’occupe trop de notre sexe et pas assez d’elle, on n’entre pas assez en relation avec elle. Plus jeune (vers les 20 ans), quand j’avais des pannes d’érection (note : et oui, je suis plutôt de la catégorie « panne d’érection » que de la catégorie « éjaculation précoce »…) j’étais surpris de la gentillesse de mes partenaires qui ne m’ont jamais fait sentir que j’étais un minable, pas un mec ou un moins que rien (évidemment mes peurs)… Comme j’avais déjà mon côté scientifique, je cherchais les trucs qui marchait : j’avais constaté que la pression et l’anxiété, et donc la difficulté à bander, était plus forte si je faisais l’amour en pleine lumière et sur le lit. En revanche avec une petite lumière et dans les draps, c’était plus facile…
Je me souviens d’une fois où j’étais avec une super-nana (wow, rien que d’y repenser) et on s’est retrouvé dans ma chambre alors qu’on venait juste de se rencontrer quelques heures auparavant… J’avais 21 ans et j’étais tout feu tout flamme, mais en même temps j’étais super anxieux, et je me disais « il faut que j’assure devant cette super fille »… Et bien entendu, panne de matériel… Et là, j’ai eu l’intuition géniale, je ne sais pas ce qui m’a pris… Je lui ai simplement dit que j’avais des problèmes parfois. On s’est mis dans les draps (et pas sur le lit comme au début) et on a parlé de nous. Et tout d’un coup j’ai senti sa présence, sa peau, je n’étais plus centré sur moi et sur mes désirs de paraître le super-mec. Je l’ai regardée différemment, et elle aussi son regard a changé. Je dirais maintenant que le « circuit du désir » s’est mis en place.. Je la désirais intensément.. D’un seul coup j’ai senti mon sexe gonfler et en quelques secondes il est devenu très dur… J’étais maintenant plein de désir envers elle, mes peurs avaient disparues. Très lentement, nous nous sommes embrassés, puis caressés, et … nous avons passé une nuit merveilleuse (désolé il n’y aura pas de détails croustillants ☺ ).
A l’époque je n’avais pas bien compris ce qui s’était passé, mais aujourd’hui je dirais que j’étais passé de la spirale infernale de l’anxiété, de la volonté d’« être à la hauteur », de la panne d’érection et du manque d’estime de moi, c’est-à-dire d’un mode de pensée totalement centré sur moi, à la spirale du désir, qui passe par la relation avec ma partenaire, du contact par le regard, des caresses sans intentions, d’une attention à son corps et à ses mouvements, c’est-à-dire de la rencontre profonde et vraie avec elle, ce qui donna lieu à une érection, à un plus grande confiance en moi, et donc à encore plus de contact avec elle.
Bon, je me mets à votre place… Vous vous dites : «C’est bien beau ton histoire, mais moi, concrètement, je fais comment pour assurer la prochaine fois ?» C’est vrai que dans tous les articles et livres sur les problèmes de virilité, il est dit qu’il faut se détendre… Mais c’est plus facile à dire qu’à faire… Alors dans un prochain article sur ce blog, je vous parlerai des « techniques » pour aider à entrer dans la spirale du désir et de la Vie (et ensuite ignorer l’aspect technique) et surtout pour sortir de la spirale infernale de l’anxiété et du repli sur soi.
J’ai de la chance… Mon homme est a la hauteur….
ça c’est du commentaire éclairé.
ça aide bcp les hommes qui viennent lire cet article parce qu’ils font fasse à des soucis d’ordre sexuel.
Et en plus, ça ne propage pas la veille idée pourrit que être à la hauteur pour un homme c’est être en érection et avoir bcp de relations sexuelles.
Bon, après ce commentaire date de 2008. Valérie à peut être évolué depuis.
En fait, Valérie (j’aime beacoup ce prénom..), heureusement, que globalement la plupart des hommes arrivent à bander pendant suffisamment longtemps..C’est quand même le phénomène logique, et notre corps est fait pour ça. Ce que je dis c’est que dans une vie il y a parfois des pannes ou des difficultés « mécaniques » qui sont liées à des peurs.. En général, dans un couple, ces peurs diminuent, voire disparaissent souvent.. Ce que je vais essayer, dans mes prochains billets sur la question, c’est de montrer qu’il existe une fois de sortie de ces problèmes, et qu’il ne s’agit pas juste d’un remêde, mais que ouvre vers un développement merveileux de plaisir..
Et merci d’avoir posté ce commentaire..
Jacques
« On est totalement dans notre mental à penser à tous nos problèmes mais pas en relation avec cette femme, avec son regard, son souffle, ses désirs, son corps qui réagit à nos caresses.. Ce n’est plus réellement un partage ou une rencontre faite de découverte et de sensualité, mais juste un film intérieur que l’on vit tout seul… » C’est triste que de se retrouver en tant que spectatrice à ce film ! Mais là, vous m’aidez vraiment à mieux comprendre les hommes. Et puis, le couple, oui, c’est un espoir, c’est le lieu de la construction de cette véritable intimité.
C’est super important de dire qu’il faut passer par la technique… pour pouvoir l’oublier !
Quand on me dit qu’il faut juste être naturel, que cela ne doit pas s’apprendre etc, je réponds souvent par une question : « et un peintre, il perd de son inspiration à mesure qu’il maîtrise mieux son art? »
L’amour est aussi un art.
La technique c’est comme le dit cette phrase : « la connaissance, c’est ce qui reste quand on a tout oublié ».
Mais il faut bien savoir avant d’oublier…