Par Jacques Ferber.

Il existe tout un ensemble de voies spirituelles, mais il me semble qu’il en existe trois essentielles qui correspondent aux centres énergétiques fondamentaux de l’être : la voie de la conscience (3ème oeil), la voie de l’amour et du sacrifice (le coeur), la voie de la transmutation et de la puissance (le hara/Grotte Sacrée, sexe).

La voie de la conscience a été particulièrement développée dans le Bouddhisme : la cessation de la souffrance du moi, par l’arrêt des désirs, mais aussi l’arrêt des pensées dans le calme absolu de la Nature essentielle de l’Esprit. Les techniques de méditation de type Vipassana ou de claire conscience consistent à être le témoin non interventionniste de tout ce qui se passe à l’intérieur et à l’extérieur de nous. Dans ce calme, l’individu se dissout pour devenir une simple présence « je suis », totalement désidentifié de sa propre personnalité, et atteindre l’état de Śūnyatā, dans lequel il n’y a plus de différence sujet / objet.

La voie de l’amour et du sacrifice a été incarnée par Yeshua, le christ. Il s’agit d’abord et avant de reconnaître le lien que nous avons avec toute chose et l’amour inconditionnel qui en résulte. Il n’y a pas de séparation, il n’y a pas d’être séparé. Dans ce cas, l’amour pour chacun, et pour chaque chose, m’inonde, puisqu’il n’y a plus de peurs à avoir vis à vis de l’autre. Mais pour vivre pleinement cet amour, pour ne pas en rester à un amour d’ego à égo, où à la fois j’aime mais je veux obtenir quelque chose en retour, il s’agit de sacrifier cet ego à l’autel du divin. C’est pourquoi la voie christique est celle du sacrifice : le sacrifice de l’ego, des désirs, des attachements, de la personne. Ici aussi, dans cette voie, on atteint la pure présence du « je suis », le « Eyeh Esher Eyeh » de Dieu qui nous emplit de sa Grâce, et nous vivre l’amour absolu et inconditionnel.

Il existe enfin une troisième voie, la voie de la transmutation, qui a été moins connue et qui n’a pas donné lieu à des religions exotériques (c’est à dire des religions pour tout le monde, comme le sont le Christianisme, l’Islam, le Judaïsme, l’Hindouisme et le Bouddhisme). Elle prend sa source dans la transmutation de la matière, à partir de la fusion des énergies féminines et masculines. En occident, cette voie a été développée par l’alchimie, la magie et les pratiques occultes (Hermès Trismégiste, culture d’Isis), et en Orient, ce sont les traditions tantrique et taoïste qui en ont été les porteuses. Elle prend sa source dans la puissance sexuelle et sa transmutation par le Coeur et la Conscience.

Chacune de ces voies, conduit à la suppression et à la transmutation de la souffrance : la voie bouddhique supprime le désir et développe la Conscience (awareness) et la Sagesse, la voie christique transcende la souffrance dans le sacrifice de sa personne et dans l’Amour inconditionnel, la voie alchimique transmute la matière dans l’action.

Évidemment, chacune de ces voies emprunte aux autres : dans le Mahayana, l’amour et le sacrifice du Bodhisattva est une incarnation de la voie du cœur. La voie alchimique mets aussi l’accent sur la Conscience, la Sagesse et l’Amour, et il semblerait que certains aspects ésotériques de la voie christique ait pu rencontrer l’alchimie de la transmutation des âmes par la rencontre sexuelle avec le bien aimé (qu’il s’agisse du divin ou de l’être cher avec lequel s’effectue le Mariage Sacré). Ces dernières années on a pu voir ainsi un rapprochement essentiel entre la voie christique et le tantra par l’importance nouvelle que prend Marie-Madeleine dans les nouveaux courants spirituels, considérée comme la compagne de Yeshua, celle qui lui enseigne la sexualité sacrée (voir à ce sujet « Le manuscrit de Marie-Madeleine« , et les livres, plus réservés néanmoins, de J.-Y. Leloup (On pourra lire avec bonheur son roman qui n’en est pas tout à fait un: « Une femme innombrable« ))

Mais ces trois voies en nécessitent finalement une quatrième, qui n’a été révélée que récemment, et que j’appellerai la Voie Luciférienne.
Je reviendrai un jour sur Lucifer, le porteur de Lumière, prince de la dualité, qui a souvent pris le visage de Satan (l’accusateur) et du Diable (celui qui divise). Cette voie, qui s’intègre naturellement aux autres, porte sur le travail de l’Ombre, sur tout ce que nous ne voulons pas voir en nous, sur tout ce qui devient la source de nos angoisses et de nos répulsions. Elle a été découverte en Occident, par le travail psychothérapeutique, notamment par Freud, mais surtout par Jung qui en a donné une vision claire en reliant cette ombre individuelle à l’ombre collective inconsciente de nos sociétés, et plus généralement de toute l’espère humaine. Il ne s’agit pas de suivre Lucifer, mais de reconnaître, de pardonner, et d’intégrer, en la transmutant en Lumière, cette part d’ombre qui est en nous.

Il me semble qu’il existe en ce moment une synthèse qui commence à prendre forme entre ces différentes voies, afin de former l’union de l’Incarnation, du Coeur et de l’Esprit et d’une manière générale, l’union « intégrale » : alliance du masculin et du féminin (en soi et en couple), union de l’action et de la sagesse, de la relation verticale (vers le divin) et action horizontale (action dans le monde).
Cette synthèse, en reliant au plus profond des traditions a priori séparées mais pourtant sœurs, permet d’accélérer le développement individuel et collectif de l’humanité.

L’approche intégrale, celle que nous proposons à Tantra Intégral s’effectue d’abord à l’intérieur de soi, au plus profond de son être, en reliant tout ce qui est vécu comme séparé et distinct, en réunissant ce qui a été disjoint, voire dissocié. Relier le sexe (et le ventre) au coeur et au troisième oeil, relier la base vitale de notre survie immédiate et l’aspiration au divin, aller au delà de l’ego pour atteindre la reliance du coeur, et intégrer cette ombre à nous mêmes, afin de diminuer le mécanisme de projection, source des peurs et des exclusions de toute nature… Ensuite, à partir de ce lieu où la Puissance, l’Amour et la Sagesse ne font plus qu’un, il est possible d’amener le travail à l’extérieur de ce temple et ainsi de transformer le monde.

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